Bachelard et Jankélévich, philosophes de L’eau. Quelques Fragments De Philosophie De L’imaginaire

Résumé

Nul ne penserait, à première vue, à rapprocher les philosophies de Bachelard et de Jankélévitch, tant leurs champs ordinaires de travail sont éloignés. Et pourtant, l’un comme l’autre a tenté une philosophie de l’imaginaire qui va à contre-courant de la façon ordinaire de s’y affairer. En effet, la plupart du temps, c’est l’image visuelle qui, au XXe siècle, a servi de référence aux auteurs qui s’y sont essayés ; sans qu’ils ne s’expliquent jamais sur ce choix. Or les deux hommes, qui se connaissaient, puisqu’ils ont été tous deux professeurs à la Sorbonne, qui se sont certainement lus – au moins Jankélévitch cite-t-il Bachelard –, prennent le contre-pied de parler de l’image comme un être transcendant, manifestent une propriété d’immanence de l’imaginaire et, du coup, choisissent la musique comme schème principal de l’imaginaire. Ce choix va de soi pour un pianiste comme Jankélévitch ; il est moins évident et suit des voies plus sinueuses chez Bachelard qui, évitant de prendre les objets de la vision comme référents privilégiés d’une réflexion sur l’imagination, se trouve en présence d’éléments comme l’eau, la terre, le feu, l’air qui ne sont ni des objets, ni même des choses. Ces éléments se disent, se songent à travers la poésie et à travers la musique, laquelle n’est pas forcément une musique instrumentale comme chez Jankélévitch et de préférence pianistique, mais qui s’en accommode pour des raisons qui n’ont cessé de rapprocher nos deux auteurs. C’est de cette étonnante expérience de rapprochement dont nous avons essayé de rendre compte et que nous voudrions essayer de conserver à travers la notion de fiction que ni l’un ni l’autre n’a particulièrement cherché à creuser, mais dont l’un et l’autre nous paraissent léguer le travail.

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